Généalogie et...

Ecrits - Nouvelles

"Cours particulier, à Asnières-sur-Seine" par Claudine Alonso

J’ai longtemps regretté être née et avoir vécu toute ma jeunesse en banlieue...
J’aurais préféré être originaire de province, avoir la nostalgie d’ un village natal, d’un berceau familial ancestral, d’une région qui aurait donné du caractère à mes souvenirs...
Un jour que je me présentais en province comme venant de Paris, mon interlocuteur me cloua, comme si j’avais usé de faux : j’appris ainsi que les Parisiens, les vrais, les “intra-muraux”, ne souffrent pas qu’on usurpe leurs prérogatives en la matière : ils ont le titre, la noblesse. Pas moi ! Je ne pouvais pas m’identifier comme citadine de classe ! J’étais de la banlieue...
J’ai cru que, finalement, je venais de nulle part. D’aucun lieu qui mérite qu’on en parle. D’une ville avec ses inconvénients : la grisaille, le manque de verdure, le bruit, le trafic, la foule, les odeurs, la saleté, c’est tout...
Il y a pourtant, tout au fond de ma mémoire, quelques bribes d’instants magiques, quand mon grand-père m’emmenait près du pont d'Asnières, il y a bien longtemps, voir “les baigneurs”, comme il disait... C’est aussi cette émotion qui me surprend agréablement, chaque fois que nous longeons les quais de la Seine en voiture, ou que je la franchis en métro. La Seine... Peut-être qu’enfant, je la ressentais comme une invitation au voyage... C’était en tout cas une merveilleuse attraction...
Maintenant encore, quand j’aperçois le fleuve, je me sens nourrie d’enthousiasme, à la fois en partance et de là. Je respire...
Et puis, des recherches généalogiques m’ont appris que mes ancêtres ont vécu de cette partie de la Seine pendant des siècles. De Clichy à Neuilly en passant par Courbevoie : ils y furent blanchisseurs, ou vignerons sur les côteaux, jusqu'à Suresnes et Issy-les- Moulineaux...
Alors j’ai compris pourquoi, pour moi, en cet endroit de ses boucles, la Seine a un cours... particulier.